Parshat Parchat Vayakhel en francais
Compiled and Edited by Elan Perchik
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Parachat Vayakhel Print Version
25 Adar 5779 | 2 Mars 2019
Compilé et édité par Elan Perchik
Traduit par Sarah Saghroun
Rav 'Haim Rosenfeld
Face à face
ויהיו הכרובים ...ופניהם איש אל אחיו
Et les Kerouvim…. se faisaient face l'un l'autre (Chémoth 37, 9)
Bien des juifs dans le monde visitent fréquemment Erets Israël mais certains y vont tout spécialement au moment des fêtes de Tichri. Ces journées rythmées par les prières intenses et la foule de Juifs venus du monde entier sont absolument immanquables. Un groupe d’Anglais décida d’y aller pour Yom Kippour. Ils avaient prévu de se rendre dans une synagogue dans laquelle officierait un 'hazan particulièrement réputé et à la voix très agréable. Le groupe se retrouva à l'aéroport quelques jours avant Yom Kippour et tous embarquèrent dans l'avion, impatients de vivre cette grande journée.
Une de ces personnes était M. Goldstein et il avait réservé à l'hôtel King David. Il s’installa confortablement dans son siège et se tourna vers son voisin. Ce dernier ne portait pas de kippa et M. Goldstein supposa qu'il était un juif non pratiquant. Il s'adressa chaleureusement à lui en se présentant et lui demanda comment il s'appelait. Le voisin, entendant ce salut amical, répondit : « Bonjour. Je m'appelle Morris Che'hter. » Les deux hommes commencèrent à bavarder et très vite ils discutèrent de judaïsme. « Vous savez » dit M. Goldstein « à notre retour en Angleterre, j’aimerais vous inviter à passer un Chabbath chez moi. » « Non, je ne préfère pas. » Morris rétorqua rapidement « J’en ai fini avec le judaïsme. » Retroussant sa manche, Morris lui montra les chiffres tatoués sur son bras : « Je suis passé par les camps de concentration et j'ai survécu. Mais j'avais un fils que j'aimais tendrement et les nazis me l'ont pris. Je n'ai plus jamais revu mon fils depuis ce jour-là et cela fait plus de trente ans. Je ne sais pas ce qu’il est devenu. Il a probablement été tué. Laissez-moi vous assurer que je ne respecterai plus jamais le Chabbath, et que je ne mettrai plus jamais les téfiline. Je ne veux plus entendre parler ni de D. ni du judaïsme. »
M. Goldstein, consterné par ce qu'il entendait, se demanda ce qu’il pourrait lui répondre : « Je suis tellement désolé d'entendre tout ceci. J'aimerais beaucoup que nous trouvions un moment pour en discuter à notre retour en Angleterre. En tout cas, si jamais vous le souhaitiez, vous êtes toujours le bienvenu chez moi. » M. Goldstein décida de demander à Morris son adresse et son numéro de téléphone plus tard, et les deux hommes mirent à profit le temps qu'il leur restait dans l'avion pour se reposer.
Après l'atterrissage, les passagers sortirent de l'avion et se dirigèrent vers la sortie pour récupérer leurs bagages. Morris et M. Goldstein sortirent également tous deux de l'avion, mais leurs chemins se séparèrent. M. Goldstein récupéra ses bagages et chercha partout Morris mais ne le trouva pas. Il était déçu et regrettait terriblement de ne pas avoir pris son numéro de téléphone plus tôt. Ne pouvant plus rien faire pour le retrouver, il quitta l'aéroport et se rendit à son hôtel, le King David.
Yom Kippour aurait lieu quelques jours plus tard. M. Goldstein attendait impatiemment que cette journée arrive, et avec elle ses prières revigorantes et source d'inspiration. Lorsque Yom Kippour arriva enfin, M. Goldstein prit le chemin de la synagogue, située à proximité de son hôtel, et les prières du soir furent magnifiques, comme prévu. Arriva ensuite le matin. Après la prière du matin, l'assemblée se prépara à réciter la prière du Yizkor, qui commémore les parents décédés. M. Goldstein, ayant ses deux parents en vie, sortit de la salle pendant cette prière, comme le veut la tradition. Il décida de marcher un peu dehors en attendant qu'elle se termine.
Il marchait dans la rue quand il aperçut soudain un visage qui lui semblait familier. C’était un homme assis sur un banc, en train de manger un sandwich. M. Goldstein se rapprocha légèrement et ne put en croire ses yeux. « Morris ? » La personne leva la tête, c'était bien Morris.
« - Goldstein ! Comment allez-vous ?
- Morris, savez-vous que c’est Yom Kippour aujourd'hui ? Presque tout le monde jeûne, même ceux qui sont loin du judaïsme.
- Ne vous ai-je pas dit que je n'ai plus rien à voir avec la religion, dit Morris en prenant une autre bouchée. Avant, j'étais un juif religieux, mais j'ai tout laissé tomber. »
Debout là, M. Goldstein était incrédule et en état de choc. Il pensa à ce qu’il pourrait bien dire. « Ecoutez, ils sont en train de réciter maintenant à la synagogue la prière du Yizkor. C'est la prière qui commémore les défunts. Pourquoi n’iriez-vous pas et vous pourriez mentionner le nom de votre fils. Vous l'honoreriez ainsi. » Morris ne bougeait pas. « Je vous ai déjà dit que je n’ai rien à faire avec D. ou avec le judaïsme ! » La situation était tendue, M. Goldstein savait qu'il devait trouver un bon argument pour répondre. « Ne le faites pas pour vous, faites-le pour votre fils. » Après un moment de silence, Morris dit : « - Je ne suis pas habillé comme il convient pour entrer dans la synagogue.
- Ne vous en faites pas pour cela, l'assura M. Goldstein. Allez-y simplement, c'est le principal. » Morris finit par accepter.
En entrant dans la synagogue, les gens le remarquèrent mais Morris continuait à avancer lentement en direction de la bima où se trouvait le 'hazan. Ce dernier se tourna vers Morris et lui demanda : « - Comment s'appelait le niftar (défunt) ?
- Ya'akov.
- Et comment vous appelez-vous ? poursuivit le 'hazan
- Morris.
- Non, interrompit le 'hazan, votre prénom hébraïque ?
- Moché.
- ok, Ya'akov ben Moché. »
Puis le 'hazan s'arrêta. Quelques secondes passèrent et se fut le silence. Se tournant vers Morris, le 'hazan lui demanda : « Quel est votre nom de famille ? » « Mon nom de famille ? » demanda Morris confus : « - Pourquoi avez-vous besoin de mon nom de famille ?
- Dites-le moi, répéta le 'hazan
- Che'hter, répondit Morris. »
Le silence régna. Le 'hazan, les yeux emplis de larmes, regarda fixement Morris : « Papa ? C'est bien toi ? Où étais-tu ? Cela fait trente-sept ans que je te cherche ! Après la guerre, je ne savais pas où tu étais. C’est toi, mon père et moi, je suis Ya'akov ben Moché ! »
Pendant ce temps tous les fidèles sortis au moment de Yizkor étaient revenus à la synagogue. Morris et son fils bien-aimé n'étaient pas les seuls à pleurer, l'assistance toute entière était aux larmes. Le temps semblait s'être arrêté. M. Goldstein était profondément ému. De fait, il avait espéré que ce Yom Kippour serait une journée exaltante et source d'inspiration. Nul doute que c'était bien le cas.
Morris avait peut-être renoncé à Hachem, mais Hachem n'avait jamais renoncé à lui. Et il est certain qu’Hachem ne renonce à aucun de Ses enfants. Quelle que soit la distance qui sépare le juif du Judaïsme, le chemin de retour à la maison peut être juste derrière le coin. Et lorsque l’homme arrivera à la maison, nul ne peut prédire ce qui pourrait se passer. Ce n’est pas seulement Hachem qu’il retrouvera mais aussi parfois son propre fils, qui lui dirait alors : « Papa, je t'ai cherché pendant des années ! »
Rav Mordekhai Kraft
Ce qu'on apprend de l'alphabet hébraïque – l'ADN de la création
וימלא אתו רוח אלקים בחכמה בתבונה ובדעת
Hachem remplit Betsalel d'un souffle divin, de sagesse, d'intelligence et de savoir… (Chémot 35, 31)
Betsalel connaissait l'art de combiner les lettres par lesquelles le ciel et la terre ont été créées… (Bérakhoth 55a)
Il est écrit dans le Zohar que Hachem créa le monde avec les vingt-deux lettres de l'alphabet hébraïque. On voit une allusion à cela dans les tout premiers mots de la Torah : "בראשית ברא אלוקים את – Au commencement Hachem créa את." Le mot את se réfère à l'alphabet hébraïque qui commence par la lettre aleph (א) et se termine par la lettre tav (ת). Le plan du monde et son ADN sont à proprement parler les lettres de l'alphabet hébraïque.
Si on analyse le lachon hakodech, on constate quatre grandes lignes directrices d'analyse : (1) le sens du mot, (2) la forme des lettres, (3) la guématria (valeur numérique : א vaut 1, ב vaut 2, ג vaut 3, etc…), (4) la première fois qu'apparaissent des lettres dans la Torah formant la racine d'un mot.
Maintenant que nous savons que l'alphabet hébraïque est plus profond qu'il n'en a l'air, faisons un petit voyage dans le monde de l'Aleph-Beth pour en savoir plus et apprendre des enseignements de la sagesse qui y est contenue.
La valeur numérique du א (aleph) est 1. C'est aussi la lettre qui fait référence à Hachem, l'Unique créateur du monde. Si on épelle le mot aleph (אלף) à l'envers, on obtient le mot pélé, פלא, qui signifie merveille ou stupéfaction. Pourquoi ?
Nous sommes des êtres humains limités, et il nous sera toujours impossible d'appréhender Hachem, qui est infini. Il se peut que nous comprenions le comportement de Hachem lors d'incidents isolés, mais de manière générale, Ses voies sont impénétrables : nous serons toujours astreints au "pélé" du "aleph" : il y aura toujours des aspects de la vie que nous ne pourrons pas comprendre et qui dépasseront notre entendement. Ceci est dû au fait que Hachem est au-dessus de toute compréhension humaine. Nous n'avons d'autre choix que de placer notre confiance en Lui et savoir qu'Il dirige le mode à la micro-précision près.
C'est pour cela qu'en récitant le Chéma', nous plaçons la main sur les yeux : Alors que nous sommes en train de proclamer l'unicité de Hachem, nous reconnaissons que nous n'avons pas toujours le privilège de voir ce qu'Il fait en coulisses. Cependant, même lorsque nous ne voyons pas clairement ce qu'il en est, nous continuons à croire fermement que Hachem est Un et que tout ce qu'Il fait est pour notre bien.
Au passage, le mot qui désigne la nature est hatéva' – הטבע. Ce mot a la valeur numérique de 86, comme le mot אלוקים – Elokim qui est un des Noms de Hachem. Le monde est rempli de D. et de Sa sagesse. A cet égard, l'étude de la nature permet de détecter la présence de Hachem dans le monde.
D'un autre côté, si on vocalise différemment le mot désignant la nature, téva', on obtient le mot טבע – tava' qui signifie se noyer. L'homme peut soit découvrir D. au travers de la nature, soit se noyer en elle et croire qu'elle s'est créée toute seule.
Nous avons le libre-arbitre, et pouvons décider soit de croire en Hachem, soit de renier Son existence. Il est intéressant de noter que le mot "libre-arbitre" en hébreu vient de la racine בחר – ba'har. Si on réécrit ce mot en disposant les lettres de manière différente, on obtient le mot חבר – ami. Mais on peut également obtenir le mot חרב – épée. Ainsi, notre libre-arbitre nous permet soit de devenir ami avec D., soit de nous battre contre Lui.
Une des merveilles du monde est le miracle que constitue la création d'une vie humaine. Si on considère qu'une grossesse dure en moyenne neuf mois, et que chaque mois a une durée moyenne de 30 jours, on en déduit qu'une grossesse (הריון) dure 271 jours. Or la guématria du mot הריון est 271.
Le mot qui désigne l'être humain est Adam (אדם). En modifiant l'ordre des lettres, on obtient le mot מאד, qui signifie beaucoup. La mission de l'homme en ce monde est de toujours vouloir accomplir beaucoup, de devenir meilleur, et de ne jamais se satisfaire de son niveau actuel. Par ailleurs, un animal se dit בהמה. En coupant ce mot en deux, on obtient la nature de l'animal : בה מה, ou littéralement : "que contient-il ?" En effet, privé d'âme, l'animal ne contient pas plus que son apparence extérieure.
Soit un mot donné écrit d'une certaine manière. En redisposant différemment les lettres qui le constituent, on peut obtenir un autre mot, qui possède un sens complètement différent du premier. Le concept sous-jacent à ce phénomène est qu'un don qui nous est attribué dans ce monde peut soit nous aider à grimper et à atteindre des plateaux spirituels plus élevés, soit au contraire nous pousser vers le bas, et nous faire chuter.
Nous recherchons tous dans ce monde la jouissance (ענג), mais cette recherche est à double tranchant. Le bien-être peut enrichir notre vie et nous rapprocher de Hachem. Cependant, les plaisirs matériels sont à même de détourner celui qui en abuse de D. et d'une satisfaction interne. Dans ce cas, le ענג – plaisir se transformera en נגע – plaie ; les plaisirs matériels n'auront pas été là pour pousser vers le haut et aider à devenir meilleur. Ils auront fait plonger leur proie dans une abysse d'autodestruction.
Une abondance de richesse (שפע) présente également un challenge. Si une personne en possède et l'utilise à bon escient, elle pourra enrichir - dans tous les sens du terme - sa vie. Par contre, cette même richesse utilisée négligemment et à de mauvais usages risquera de devenir source de פשע (faute), et sera dirigée à des fins destructrices.
Il se peut que nous pensions que certains événements de notre vie sont mauvais (רע), mais en réalité, le but des difficultés que nous rencontrons est de nous "éveiller" (ער) à la réalité et de nous pousser à changer notre manière d'agir et à devenir meilleur.
Ce qui semble être une punition (ענש) est un moyen pour nous de nous développer et d'atteindre notre potentiel. On le voit dans l'orthographe même du mot : La première lettre – ע – se prononce עין, qui signifie littéralement "œil". Le travail de l'œil est de voir, d'analyser et d'examiner. Les deux dernières lettres – נש – font référence à l'acte de "tomber". Par exemple, un aigle est désigné נשר. En effet, les plumes des aigles muent (confirmé par des ornithologues) : c'est-à-dire qu'à commencer par les plumes de la tête, toutes leurs plumes tombent. C'est pour faire allusion à cette caractéristique que l'aigle est appelé נשר, qui signifie littéralement : "qui tombe".
Ainsi, on peut voir d'un œil nouveau la notion de punition : Lorsque quelque chose de pénible nous arrive, nous ne devons pas nous considérer "punis" dans le sens classique du terme. Hachem nous permet en réalité de "voir que nous sommes tombés". Les difficultés par lesquelles nous passons doivent nous ouvrir les "yeux", pour que nous puissions constater que nous sommes "tombés" spirituellement. Il nous faut alors corriger notre trajectoire de vie, et réévaluer notre comportement. Bref, nous devons "עין נש" : constater que nous sommes tombés, et voir comment nous relever.
Nous n'avons fait qu'effleurer là la profondeur de l'alphabet hébraïque… Ce premier aperçu nous aura tout de même permis de conclure de manière certaine à l'origine purement divine de l'alphabet hébraïque. Il est impossible que cette langue ait pu être produite par la simple imagination humaine. Chaque nuance de l'alphabet hébraïque est porteuse de sens, et constitue une des briques ayant servi à construire le monde. Il ne nous reste plus qu'à ouvrir les yeux, et apprécier la sagesse et la profondeur extraordinaires contenues dans le Aleph-Beth.
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